5a.2.5.1 Restrictions de l’usage privé

Les limitations pour l’usage privé (art. 19 LDA) ne s’appliquent pas de manière absolue, mais sont elles-mêmes encore restreintes («contre-exceptions» ou «exceptions aux exceptions») pour ne pas porter atteinte outre mesure à l’auteur ou au titulaire de droits dans son droit exclusif. Dans cette optique, la loi prévoit les réglementations suivantes à l’art. 19, al. 3 LDA:

Dans la loi, l’enregistrement des interprétations, représentations ou exécutions d’une œuvre sur des phonogrammes, vidéogrammes ou autres supports de données (art. 19, al. 3, let. d LDA) est également interdit. Dans la doctrine juridique, la question de savoir si cette interdiction est également valable pour le simple usage privé et personnel (art. 19, al. 1, let. a LDA) est controversée. Pour une partie de la doctrine, une personne assistant à un concert a le droit, par exemple, de filmer son groupe favori en live lors d’un concert public, puis de visionner le film sur son ordinateur à la maison, parce qu’elle a procédé à cet enregistrement uniquement pour son propre usage privé (cf., avec d’autres renvois, Müller/Oertli-Gasser, Urheberrechtsgesetz, 2e éd., art. 19, N. 47). Indépendamment de cette controverse juridique, il est à relever qu’il n’est pratiquement pas possible d’imposer cette interdiction à l’époque du téléphone portable. En tout cas, l’interdiction ne s’applique certainement pas lorsque des enregistrements sont faits dans le cadre de l’usage privé lors de manifestations non publiques telles que des spectacles d’élèves et des événements privés. De plus, concernant l’enregistrement d’interprétations, de représentations ou d’exécutions d’une œuvre sur des phonogrammes, vidéogrammes ou autres supports de données (art. 19, al. 3, let.d LDA) dans le cadre de l’usage privé à des fins pédagogiques, les Tarifs communs (TC) laissent davantage de liberté que la loi (cf. TC 7).

BON À SAVOIR

«Disponible sur le marché» (art. 19, al. 3, let. a LDA)

art. 19, al. 3, let. a LDA
Le terme «disponible sur le marché» date de l’époque pré-numérique où des livres et des disques étaient vendus dans des librairies et d’autres magasins et où il n’était pas possible d’acquérir des chansons, des articles ou des images séparément par Internet.

Une œuvre était considérée comme épuisée quand on ne pouvait plus l’acheter dans le commerce. Avec les possibilités du numérique, la situation est beaucoup plus compliquée. Les questions suivantes se posent: un livre dont l’édition imprimée est épuisée et pour lequel plus aucune réédition n’est prévue, mais qu’on peut encore acquérir ou même télécharger gratuitement sous forme d’e-book sur le site Internet privé de l’auteur, doit-il encore être considéré comme «disponible sur le marché»? Ou qu’en est-il d’un disque qu’on ne peut plus, depuis longtemps, acheter par la voie habituelle, mais qu’on trouvera encore éventuellement auprès d’un collectionneur? Le terme «disponible sur le marché» doit donc être adapté aux formes de vente numériques: en principe, une œuvre est également «disponible sur le marché» quand il est possible de l’acquérir via Internet. La conséquence est toutefois que les œuvres n’atteignent plus guère le statut d’«épuisées». Cependant, l’élément décisif reste, pour l’œuvre en question, celui de la forme de distribution usuelle dans le commerce. Autrement dit, l’éditeur ne peut pas protéger sa commercialisation d’un livre en proposant, en plus de l’édition sous forme imprimée, l’achat de chaque chapitre séparément sur son site Internet, sous forme de document PDF. Il en va différemment quand l’éditeur vend le livre à la fois sous forme imprimée et sous forme d’e-book. Tant que l’e-book est disponible sur Internet, peu importe que l’édition imprimée soit épuisée à un moment ou à un autre. Si toutefois un livre imprimé ne se trouve plus qu’auprès des brocanteurs traditionnels, il n’est plus considéré comme disponible sur le marché. Les sites de ventes d’occasion sous forme numérique comme eBay ou Amazon.

Services à la demande – reproduction d’œuvres mises à disposition en ligne par contrat

Quelle est l’étendue autorisée et la rémunération (art. 20 CopA) des téléchargements légaux, par exemple via iTunes (art. 19, al. 3, let. a LDA )? Le téléchargement est une reproduction qui, dans la mesure où elle est effectuée pour un usage privé mais en dehors d’un cercle de personnes étroitement liées ( art. 19, al. 3 LDA s’il est fait en dehors du strict usage privé, dans la sphère personnelle ou dans un cercle privé (art. 19, al. 1, let. a LDA ) mais pour les autres utilisations privées (éducatives ou professionnelles). Ainsi, vous pourriez potentiellement ne pouvoir faire que des copies incomplètes ( art. 19, al. 3, let. a LDA ) d’autre part, une rémunération au sens de l’ art. 20 LDA devrait être versée Cela conduirait à la situation contradictoire où un utilisateur, malgré un contrat de licence conclu avec iTunes pour un téléchargement de musique, En outre, l’utilisateur devrait payer directement iTunes pour ce téléchargement, conformément au contrat de licence susmentionné, et verser une deuxième fois une rémunération aux sociétés de gestion collective à titre d’indemnisation conformément à l’art. 20 LDA. Il y a donc un croisement entre l’exploitation collective due à la licence légale et l’exploitation individuelle, basée sur la licence contractuelle. Il faut éviter cela, sinon il y aura une rémunération multiple injustifiée. C’est pour cette raison, l’art. 19, al. 3bis LDA a été introduit lors de la révision de 2007 de la loi sur le droit d’auteur. Il prévoit que les reproductions confectionnées lors de la consultation à la demande d’œuvres mises à disposition licitement ne sont pas soumises aux exceptions aux exceptions de l’ art. 19, al. 3 LDA et qu’il n’y a pas lieu non plus de payer pour cela des rémunérations selon l’art. 20 LDA aux sociétés de gestion.

Dans la doctrine, les opinions divergent toutefois quant à savoir si cette réglementation ne se réfère qu’à la première copie, donc au premier téléchargement, et si toute reproduction ultérieure – par exemple la recopie de musique depuis l’ordinateur sur le lecteur MP3 ou la reproduction à des fins pédagogiques d’articles scientifiques téléchargés d’un e-journal – tombe sous le coup de l’ art. 20 LDA. (Cf. Müller/Oertli – Gasser, Urheberrechtsgesetz, 2e éd., art. 19, n. 48a; Rehbider/Viganò, Urheberrecht, 3e éd., art. 19 n. 37; Barrelet/Egloff, Le nouveau droit d’auteur, 3e éd., art. 19, n. 28a; Brändli Sandra, Data Mining als Forschungsmethode: Die Probleme des Grabens nach Datengold, dans Mensch und Maschine – Symbiose oder Parasitismus?, 2014, p. 54 Il incombera au législateur ou aux tribunaux de clarifier ce point.

FAQ

5.2.5.1-1 Des partitions d’œuvres musicales historiques peuvent-elles être reproduites?

Les ouvrages de partitions qui ne sont plus protégés par le droit d’auteur parce que l’auteur est décédé depuis plus de 70 ans font partie du domaine public et peuvent être utilisés à volonté. Selon la Notice explicative de la société de gestion SUISA, toutefois, cela peut être illicite au regard du droit de la concurrence déloyale. L’élément déterminant est de savoir si les partitions qu’il s’agit de copier sont ce qu’on appelle des produits prêts à être mis sur le marché, que l’on reprendrait comme tels grâce à un procédé technique de reproduction et sans sacrifice correspondant. Il faut donc pour cela que les produits puissent être exploités commercialement sans le moindre travail supplémentaire (cf. ATF 131 III 384, p. 389). ).

5.2.5.1-2 En tant que particulier, ai-je le droit de télécharger de la musique ou des films depuis une bourse d’échanges Internet (peer to peer) pour mon usage personnel?

Oui, en droit suisse le téléchargement d’œuvres depuis une bourse d’échanges internet est autorisé pour l’usage privé au sens étroit (art. 19, al. 1, let. a LDA ) à condition que les œuvres proposées sur cette bourse d’échanges aient déjà été divulguées. l serait illicite de télécharger des œuvres non divulguées, car l’usage privé n’est admis que pour les œuvres divulguées. Du point de vue de l’utilisateur, peu importe qu’il télécharge depuis une source légale ou illégale.

En revanche, le téléversement (upload) vers une bourse d’échanges Internet n’est pas autorisé, car il n’est plus couvert par l’usage privé (art. 19 LDA, à moins que la bourse d’échanges ne soit utilisée que dans le cadre de l’usage privé au sens étroit, c’est-à-dire entre des personnes étroitement liées entre elles, comme des parents ou des amis.Il est à noter que de nombreux programmes de partage de fichiers fonctionnent automatiquement par téléchargement de fichiers avec téléversement en parallèle.