2.5 Recueils

Les recueils peuvent être protégés par le droit d’auteur s’ils constituent, en ce qui concerne la sélection ou la disposition, des créations de l’esprit ayant un caractère individuel art. 4, al. 1 LDA. En d’autres termes, ce qui est protégé n’est pas ce qui est «recueilli» dans le recueil. C’est plutôt la manière donc ce qui est recueilli a été sélectionné et organisé. Si cette organisation et/ou les critères de sélection sont particuliers ou originaux, le caractère individuel requis est présent. Toutefois, il fait généralement défaut dans les classements standard (par ex. classement par ordre alphabétique ou par numéros). Il fait également défaut dans des œuvres dont les critères de sélection ou la disposition correspondent à un usage courant ou ont été prescrits, ou encore quand l’enjeu est de produire un ouvrage complet. Par exemple, une compilation complète d’informations sur des médicaments exigée par la loi ne constitue pas un recueil protégé, car une sélection individuelle du contenu n’est ici tout simplement pas possible (voir Zivilgerichtspräsidium de Bâle-Ville du 20 janvier 2004, in sic! 2004, 490 ss). Les recueils officiels ou exigés par la loi ne sont pas non plus protégés (art. 5, al. 2 LDA). En revanche, les revues et les journaux sont protégés, parce que le choix et la disposition des différents articles sont des décisions individuelles des éditeurs.

Autres exemples de recueils qui peuvent être protégés: anthologies, manuels, albums d’images, etc.

Comme tout dépend non pas du contenu, mais de l’individualité et de l’originalité de l’assemblage, il n’est pas indispensable que le contenu lui-même soit protégé par le droit d’auteur (par ex., les recettes ne sont ordinairement pas protégées, mais un livre de recettes peut l’être). Lorsque des tierces personnes n’utilisent que le contenu (par ex. en mettant en ligne une recette tirée du livre de recettes susmentionné), il n’y a pas de violation des droits d’auteur portant sur le recueil, car, dans ce cas, ce n’est pas le caractère individuel du recueil (le choix et la disposition) qui est concerné, mais uniquement le contenu. La protection d’un recueil ne vise justement pas le contenu du recueil, mais la sélection et la disposition de ce contenu.

À ENVISAGER

Consentements nécessaires

D’après l’ art. 4, al. 2 LDA , la protection des œuvres réunies dans les recueils demeure réservée. Donc, si des œuvres isolées tirées du recueil sont protégées en vertu de la loi sur le droit d’auteur, elles ne perdent pas cette protection du fait qu’elles sont réunies dans le recueil.

Les personnes qui souhaitent créer un recueil à partir de différentes œuvres d’autres auteurs doivent tenir compte du fait que ces différentes œuvres peuvent être protégées par le droit d’auteur (par ex. un article pour une revue spécialisée). Si c’est le cas, le consentement de l’auteur respectif de l’œuvre isolée est nécessaire. Les personnes qui souhaitent de leur côté utiliser un tel recueil (par ex. le mettre en ligne) doivent tenir compte de deux choses: si elles ne veulent reprendre que le contenu, elles doivent se renseigner sur son éventuelle protection par le droit d’auteur et, le cas échéant, obtenir le consentement des auteurs respectifs des différentes œuvres. Si elles veulent aussi (ou, si possible, uniquement) reprendre la disposition ou la sélection qui caractérisent le recueil, elles ont besoin du consentement de l’auteur du recueil.

BON À SAVOIR

Banques de données

Les banques de données réunissent des données ou d’autres informations qui y sont ordonnées selon une méthode ou une systématique, puis sont mises à disposition par des moyens électroniques. En droit suisse, les banques de données entrent dans la rubrique des recueils. Elles sont protégées au sens de l’art. 4, al. 1 LDA quand la sélection et la disposition de leurs contenus permettent de les qualifier de création de l’esprit ayant un caractère individuel; la sélection et l’assemblage des données doivent donc être créatifs et uniques ou originaux (ex.: la présente banque de données sur les questions de droit d’auteur, ou un catalogue numérique de bibliothèque qui a été constitué selon certains critères et enrichi de mots-clés par des bibliothécaires scientifiques, ce qui exige un travail intellectuel et une certaine dose d’individualité). Si au contraire les données de la banque de données ne sont introduites que sur une base logique, selon les usages (de la branche) ou des schémas déjà prescrits, le caractère individuel fait défaut et la banque de données n’est pas protégée par le droit d’auteur (ex.: banque de données contenant des informations prescrites par la loi relatives à des médicaments, cf. Zivilgerichtspräsidium de Bâle-Ville du 20 janvier 2004, dans sic! 2004, 490 ss).

FAQ

2.5-1 Les différents numéros (les éditions) de journaux ou de revues constituent-ils des recueils au sens de l’art. 4 LDA?

En principe oui, car en elle-même la sélection des différentes contributions – indépendamment de leur protection en droit d’auteur – bénéficie de la qualification d’œuvre. Pour les quotidiens, il faut toutefois retenir que ce n’est pas la structure du journal en elle-même qui est protégée (tous les quotidiens sont constitués de manière analogue, avec des rubriques qui se ressemblent). Toutefois, l’attribution d’articles et d’annonces à certaines rubriques est protégée, car c’est là que le quotidien trouve ses particularités et son originalité.

2.5-5 Une plateforme de cours en ligne a été structurée selon un schéma conçu spécialement par les développeurs de la plateforme. Un enseignant souhaite utiliser ce schéma pour son enseignement. En a-t-il le droit sans le consentement des développeurs?

Oui et non. La plateforme de cours en ligne est une banque de données, il s’agit donc d’un recueil au sens de l’art. 4 LDA. En ce qui concerne la sélection et la disposition des contenus (données), elle est protégée si celles-ci peuvent être considérées comme des créations de l’esprit, avec un contenu individuel. Le schéma spécialement conçu pour la structure de cette plateforme remplit ces conditions. La plateforme est donc protégée par le droit d’auteur et le consentement des auteurs est en principe nécessaire. Toutefois, la disposition restrictive de l’ art. 19, al. 1, let. b LDA doit être prise en compte: elle prescrit que, dans certaines conditions où l’œuvre est utilisée pour l’enseignement, aucun consentement n’est nécessaire (usage privé à des fins pédagogiques).